« LA KAFRADO, Un nouveau départ » est le premier roman de Malika Chitour Daoudi, paru il y a quelques mois aux éditions Casbah. L’autrice s’intéresse à deux femmes qui fuient la Sicile au printemps 1862 pour s’installer dans « la Ville du Jujube ». Une nouvelle identité, un nouveau départ… puis des rencontres qui se font, des liens forts qui se tissent et une nouvelle vie qui commence. Cependant, est-il possible de tirer un trait sur son passé ? De tout effacer et tout recommencer ? Peut-être pas, mais il se peut qu’avec beaucoup de volonté et de bienveillance, et d’amis sincères aussi, rien ne soit insurmontable.
« LA KAFRADO, Un nouveau départ » s’intéresse à Francesca, une sicilienne qui fuit Angelo, un amant violent, et une existence sans perspective pour un nouveau monde, celui qu’elle aura à bâtir ailleurs. Le point de départ à cette aventure est un acte symbolisant sa libération, mais qui ne sera pas sans conséquences. Francesca, qui deviendra la Comtesse veuve Francesca Irina Giovanni da casas a Castelli, renoncera à son identité, et à ce qui pourrait symboliser sa beauté et sa féminité : « D’un geste décidé je vois Francesca se saisir de son canif de la main droite, et de sa main gauche sa belle natte blonde qu’elle coupe sans hésiter ! » (p. 20). Avant d’entreprendre la traversée, en février 1862, son regard croisera celui de Mayala, « fille du chef de la tribu des Bandiagara, puissante tribu Dogon. Enlevée par des Peuls ennemis », qu’elle achètera et libérera. Elle deviendra Dorato, sa sœur. Toutes deux seront les narratrices du roman et se relayeront pour s’exprimer à la première personne et raconter leurs différentes péripéties.
Une fois arrivée à destination, Francesca achètera un domaine qu’elle baptisera « La KAFRADO » et se liera d’amitié avec Kader et sa famille. L’évocation du personnage de Kader permet à l’autrice de mettre en avant les résistances du peuple algérien aux premières années de l’indépendance et ses luttes contre le colonisateur. Ce personnage lui permet également de revenir sur les enfumades du Dahra et le personnage de l’émir Abd-el Kader. Le parcours de Francesca sera, par ailleurs, semé d’embûches. La prospérité de son domaine, son amitié avec les « indigènes » et sa bienveillance nourrira des haines chez ses ennemis, puissants, qui convoitent « La KAFRADO ». Fragilisée, Francesca verra ses rêves et espoirs s’éloigner mais elle aura à compter sur ce qu’elle a réussi à construire en si peu de temps : ses solides amitiés (Dorato/Mayala, Luca/Bagata, Kader).
« LA KAFRADO, Un nouveau départ » fait le portrait de femmes puissantes, travailleuses, indépendantes et rêveuses, qui renoncent à tout ce qu’elles possédaient pour conquérir un nouveau monde, et mériter leur nouvelle vie. C’est aussi une histoire d’émigration, d’amitié, de courage et de bienveillance, dans le contexte violent des premières années de la colonisation. Le roman est captivant, même s’il manque parfois de détails.
Sara Kharfi
- LA KAFRADO, Un nouveau départ » de Malika Chitour Daoudi. Roman, 208 pages, éditions Casbah, Alger, 2021. Prix : 750 DA.
En savoir plus sur Algérie Littéraire
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

2 réflexions sur “« LA KAFRADO » de Malika Chitour Daoudi (éd. Casbah) : Femmes puissantes”